Lettre à Thomas Sankara
La petite pluie de ce matin nous a offert une soirée plutôt
calme où se mêlent chants de moustiques et odeur d’encens. Comme d’habitude, à
cette heure je travaille. Aujourd’hui, au fond de mon âme, s’époumonent
douleurs et tristesse. J’ai pris la décision de t’écrire pour évacuer ce flot de sentiments qui m’accable. Cela fait 32 ans que tu nous as quitté.
Aujourd’hui, c’est une soirée fade où se bousculent mille et une émotions dans
ma tête. A l’horizon, sonorités se disputent et agressent la quiétude. Nous
sommes à quelques jours du Magal de Touba, chaque coin prépare l’événement à sa
manière, bref ! Depuis plusieurs années, ce jour, 15 Octobre est synonyme
d’une profonde tristesse pour moi. Je ne t’ai jamais connu, je n’habite pas ton
pays mais quelque chose d’inouï me lie à toi.
Je t’ai connu à travers un clip à la télé en étant tout
petit. Ton nom ne me disait rien. Dieu a fait que je sois orienté au
département d’histoire à l’Université de Dakar. Là j’ai su mieux te connaitre.
J’ai fait mes propres recherches sur toi. Ils préféraient m’apprendre autre
chose que toi. Au Lycée ce fut aussi la même chose. Je racle la dernière
énergie de ma sève pour t’écrire ces mots. Qui peut essuyer les larmes du
cœur ? Peut être aurai-je un peu de répit en regarder tes légendaires
discours. J’aimerai te parler de tout ce qui s’est passé derrière toi.
Malheureusement, je ne veux pas faire trembler un tertre encore mouillé par les
larmes de mes camarades, jeunes d’Afrique, qui se voient en toi. Je te dirai
sans doute quelque chose que tu sais déjà. C’est Blaise qui t’a trahi.
Bref ! Je ne vais pas remuer la pelle dans la tombe.
Dans ma chambre, j’ai mis ta photo sur le haut du mur, à
coté de mon bureau de fortune. A chaque fois que je suis fatigué, je regarde ta
photo. Mes amis me disent que je suis fou avec toutes ces photos. En attendant
d’être le président du Sénégal, (oui camarade ! I have a dream), je
continue ta révolution à ma manière. J’ai créé un Web magazine qui revient sur
le parcours des hommes comme toi. Ton histoire a été l’objet de mon deuxième
numéro. Avec cette entreprise, je vise à conscientiser la jeunesse africaine. Jusque
là, ça avance. Là, cette musique que j’écoute commence à appeler mes glandes
lacrymales. Je ne veux pas pleurer. Tu nous as appris d’être forts !
J’espère qu’un jour je serai au Burkina, près de ta tombe. Ne serait ce que
pour y verser quelques gouttes de mes larmes enfouies dans les aisselles de mon
âme. Je m’arrête là. Nous nous verrons un jour sans doute. Quand j’aurai
accompli ma mission comme tu l’as fait. A la prochaine Camarade.
La Patrie ou la mort nous vaincrons
Bathie Samba Diagne, étudiant au département d'histoire, Université Cheikh Anta Diop de Dakar
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