Afrique, une histoire d’union
(Kwame Nkumah, un des grands panafricanistes ayant défendu l'idée d'une Afrique unique © getty images)
Par Bathie Samba Diagne, étudiant au département d'histoire à l'université Cheikh Anta Diop de Dakar
En 2020, une
grande partie des pays africain va célébrer « 60 années d’indépendance ».
Nous saisissons cette occasion pour étudier cette partie de l’histoire
africaine. L’aventure a été sinueuse…
Au début, dès
les premières heures qui suivaient l’indépendance, beaucoup de leaders avaient
tenté de mettre sur pied des projets de d’unification. Le processus, dans
certains cas, était entamé même avant 1960. C’est le cas de la fédération du
Mali qui parait au ricochet de loi cadre Gaston Deferre de 1956. Cependant,
l’échec était cuisant. En Afrique de l’ouest, il a fallu juste 2 mois pour que
la Fédération du Mali vole en éclats pour des raisons diverses que nous avions
étudié dans le dixième numéro de Grands d’Afrique qui portait sur Modibo Keita.
Un obstacle
de taille au projet d’unification résidait chez les dirigeants. Au sein même
des « pères de l’indépendance »
existaient de réels décalages s’agissant de l’idée de la création de
Fédérations. En Afrique francophone, au moment où Senghor et Modibo Keita
s’évertuaient à créer un ensemble, Léon Mba et Houphouët-Boigny s’érigeaient en
obstacle en mettant un frein aux projets de regroupements régionaux. La
division existait même entre panafricanistes. L’exemple le plus patent est
celui entre Olympio et N’Krumah. La base de cette relation tendue est la
présence du peuple Ewé d’une part et d’autre de la frontière entre les deux
pays. Aussi, les personnalités mêmes des pères de l’indépendance ne prêtaient
pas à la naissance de fédération même si parfois les dirigeants concernés
avaient le même vœu dans le fond. Dans ce registre on a Senghor et Sekou Touré,
deux hommes qui avaient certaine idée d’une Afrique unie mais tout opposait les
deux hommes. Au finish, Senghor essaiera de faire la Fédération du Mali,
quelques années plus tard, Sekou Touré fait une union symbolique avec N’Krumah
et Modibo Keita. Tous les trois alignés aux idéologies de Gauche, ce qui
rappelle aussi que la guerre froide fut un facteur déterminant.
Le début de
la décennie 1960 est marqué par cette quête de l’unité mais peu de temps après
cette idée va ne va plus être une priorité. En effet, c’est l’ère des partis
uniques ou « parti dominant » pour utiliser une expression de
Senghor. Ainsi, les présidents de républiques seront plus enclins à consolider
leur pouvoir qu’à chercher une unification hypothétique. L’exemple le plus
patent dans ce registre est celui du Sénégal. Le 20 Aout 1960, la Fédération du
Mali volait en éclats. En Décembre de la même année, c’est le «
conflit Senghor-Dia ». Senghor après ne manifestera plus une réelle envie
d’unification. Il cherchera à assoir son pouvoir ce qu’il fera en 1963 avec
l’instauration d’un régime présidentiel.
Les années
70 sont marquées par le règne des militaires qui viennent par coup d’Etat.
Mali, Niger, Togo, Bénin…peu de pays vont être épargnés. Il faut noter que des
pays comme le Togo ou le Bénin, les militaires avaient déjà gouté au pouvoir
dès le début des années 60 déjà. Ce qui fait qu’à l’époque, on a soit un régime
civil autoritaire ou une dictature militaire. Les civils au pouvoir présideront
avec une peur constante d’être renversés, même cas pour les militaires qui
redoutent de partir du pouvoir de la même manière qu’ils en sont venus.
Début des années
80, c’est l’avènement des institutions de Bretton Woods : FMI – Banque
mondiale en Afrique. Beaucoup de pays africains vont être conduits par des
plans d’ajustement structurel. Les crises commencent à se développer à la fin
des années 80 et l’exemple le plus patent est celui de la Cote d’Ivoire. Le
« miracle ivoirien » montrait ses limites à la fin des années 80. Ce
qui fait que la fin de la décennie 1980 est marquée par la contestation dans
plusieurs pays africains. Ce qui va aboutir au phénomène de
« démocratisation ». C’est l’ère des « conférences
nationales » et de la fin du parti unique.
La décennie
1990 révèle une triste réalité. Au moment où les conflits inter-états
diminuent, les guerres civiles et conflits internes prospèrent et atteignent le
paroxysme : le génocide rwandais. On note la guerre au Libéria, en Sierra
Léone, en Cote d’ivoire etc.
Aujourd’hui,
on peut se poser la question « où est ce projet d’union ? ». Tout
sauf d’actualité. Entre temps un mal a gagné l’Afrique : le terrorisme.
Les Etats subsahariens cherchent à trouver
un remède au moment où encore les « différences » ethniques
sont exploitées à des fins maléfiques.
Ce qui
ressort de cette analyse c’est que l’Afrique essaient de régler ses problèmes
du haut plutôt que de les attaquer à la base ce qui permettrait des solutions
définitives. L’avenir, c’est l’union. Seulement quelles formes lui donner c’est
aujourd’hui le débat. Cette vision naïve qui se résume à dire « nous
devons créer les Etats Unis d’Afrique » doit être revue. Plus d’une
cinquantaine de pays avec des langues différentes, des cultures
différentes…créer une organisation uniforme serait chose hypothétique. Cela
passe par un processus qui tient sur des dizaines de décennies et une forme
d’organisation qui épouse les réalités africaines. Certes cela n’est point une
mince affaire d’autant plus que le modèle occidental est dominant. Ce qu’il
faut savoir avant tout c’est que le salut de l’Afrique passe par les africains.
Aucun étranger ne va venir construire l’Afrique à la place des africains. Aux
africains de semer dès à présent les germes du changement...
Vive l'Afrique
RépondreSupprimerPértinent et je partage ce propos.L' Afrique doit grandir et mettre des jallons d'unification sur pieds qui lui permettra de s'affirmer et d'être indepindépente une bonne fois au sens propre du terme.
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