Enfance et parcours…
Né le 18 Septembre 1909 au sud
ouest Ghana près de la frontière ivoirienne,le jeune Nkrumah a pour prénom
Kwame qui évoque dans la langue Nzima le « Samedi », jour de sa naissance,
un nom donné selon la tradition. Issu d’une grande famille de plus d’une
dizaine d’enfants,Kwame Nkrumah vient d’un milieu modeste : sa mère est
commerçante et son père forgeron qui meurt alors que Nkrumah est jeune. Nkrumah
débute ses études primaires dans une école de mission catholique près de son village.
Il fut brillant et sort du lot du bon nombre de jeunes qui ne parvenaient pas à
percer dans le milieu scolaire. Après il
quitta son village pour le collège et entra à l’école normale de la ville. A ce
moment, il eu échos des mouvements noirs aux Etats Unis et commence à s’intéresser
à la chose. Par la suite il devient enseigner puis directeur d’école.
Cependant, il nourrissait les ambitions d’aller étudier aux Etats Unis et cette
idée va être renforcée suite à sa connaissance avec Nnamdi Azikiwe qui l’incite
à cela. Il faut que noter qu’Azikiwe fut le premier président du Nigeria. A ce
moment Azikiwe revenait des États Unis et gérait un journal à Accra. C’est
ainsi donc que Nkrumah se résolu à partir avec notamment une aide financière
des membres de sa famille.
Arrivé aux États Unis avec
juste 40 sterlings, il séjourne d’abord à Harlem avant de s’inscrire à
l’université Lincoln en Pennsylvanie. Il faut noter que cette université a vu
le jour en 1854 pour offrir aux jeunes noirs l’opportunité de faire des études
supérieures dans une Amérique plongée en plein racisme. Il ne va pas tarder à
obtenir une bourse d’étude. Il fait de petits jobs pour survivre tout en
s’imprégnant des milieux intellectuels. Il préside l’association des étudiants
africains d’Amérique et du Canada. Brillant
étudiant, il collectionne les diplômes : master of art and philosophie,
master in science of pédagogie et finira un doctorat en philosophie. Il
fréquente de grands noms de la lutte pour la race noire tel George Padmore.
Nkrumah, panafricanisme à l’aube
des indépendances…
En
1941, c’est la charte de l’atlantique nord qui dans ses textes défend le
droit qu'ont tous les peuples de choisir la forme de Gouvernement sous laquelle
ils entendent vivre ; et ils désirent voir restituer, à ceux qui en ont été
privés par la force, leurs droits souverains.Une opportunité que ne tarde pas à
saisir Nnamdi Azikiwe , mentor en quelque sorte de Nkrumah . Ce dernier s’aligne
derrière lui. En Juin 1945, Nkrumah quitte les Etats Unis pour Londres et
s’adjuge le combat pour la libération de son peuple.
-
Le congrès de Manchester
Octobre 1945 , c’est le congrès de
Manchester , c’est concrétisation d’un projet conçu dix ans auparavant,
constitue une césure importante dans la mesure où ce fut le dernier congrès
panafricain réuni à l’extérieur de la terre africaine, qu’il apparut aussi
comme le lieu de passage de témoin entre deux générations de dirigeants et
qu’enfin son programme prit une allure franchement politique, posant clairement
la question de l’indépendance, explicitant la problématique de l’unité et
embrassant la plupart des enjeux auxquels l’Afrique indépendante allait être
confrontée. Le
congrès vise la décolonisation du continent
noir et la prise de conscience des
Noirs. Il y est adopté un manifeste proclamant : " Nous sommes résolus à
être libres... Peuples colonisés et assujettis du monde, unissez-vous. "
William Edward Burghardt Du Bois (1868-1963), écrivain et sociologue ghanéen
d’origine américaine, fondateur en 1909 de l’Association américaine pour le
progrès des gens de couleur (National Association for the Advancement of
Coloured People, NAACP), et Garvey George Padmore (1903-1959), en sont les
organisateurs. George Padmore et Kwame Nkrumah sont élus secrétaires. Du Bois et
Padmore avaient participé ensemble à la conférence panafricaine de Londres en
1900, puis Co-organisé le premier Congrès panafricain de Paris en 1919, qui
revendiquait l’adoption d’un "code de protection internationale des
indigènes d’Afrique" : droit à la terre, à l’éducation et au travail
libre, et exigeait pour les colonies des "gouvernements responsables"
et le respect de l’indépendance d’Haïti, du Liberia et de l’Ethiopie. Après le
congrès de Manchester en 1945, Padmore et Dubois seront considérés comme les
pères du panafricanisme. Assistent à ce congrès Hailé Sélassié (Ethiopie) et
plusieurs futurs leaders anglophones de l’Afrique indépendante, Jomo Kenyatta
(Kenya), Peter Abrahams (Afrique du Sud), NamdiAzikiwe (Nigeria), Julius
Nyerere (Tanzanie), Kenneth Kaunda (Zambie) et bien sûr Kwame Nkrumah (Ghana).
La marche vers l’indépendance…
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Les facteurs
Il faut d’abord noter l’existence
d’élites intellectuelles. En effet, les Ghanéens avaient en leur sein des
personnes dotées d’un niveau d’instruction élevé et dont le background
intellectuel suscitait le respect à l’instar de Kwame Nkrumah. De ce fait, il
mobilisait des masses, dirigeait des pétitions écrites, des marches de
protestations, et menait les dialogues entre le peuple de Gold Coast et les
autorités britanniques. Ensuite on note l’urbanisation. L’agrandissement des
villes comme Accra, Koumassi, Tema et Takoradi aida à ce que les peuples de
tous bords puissent s’unir. Une fois réunies au sein des régions urbaines, les
populations étaient désormais liées non plus par des considérations tribales
mais plutôt par des intérêts communs. Ceci facilita la communication entre les
populations, laquelle permit le développement du Nationalisme. Enfin il y’a de
1940 à 1950 la prolifération des journaux permit à ce que les nationalistes
ghanéens puissent œuvrer dans la lutte pour l’autonomie. Les deux à savoir la
presse et les nationalistes renseignaient et éduquaient les populations
indigènes sur le courant des actions à entreprendre aux moments les plus
opportuns. C’est le cas des journaux tels que le « Daily Mail », « Accra
Evening News »
Nkruma et les remous…
Une nouvelle constitution
en 1946 ouvrit plus largement le Conseil législatif aux africains désormais
majoritaires tandis que le Conseil exécutif accueillit pour la première fois
trois africains. Considéré comme un grand progrès, cette mesure va susciter
beaucoup d’enthousiasme. Mais en ce moment, il y avait que deux partis
politiques « indigènes » et ils étaient impopulaires. Ces derniers
vont fusionner pour devenir l’U.G.C.C. (United Gold Coast Convention). Et pour
donner un nouveau souffle à ce parti, ils proposent à Nkrumah le poste de secrétairegénéral.
Cependant, Nkrumah était en décalage sur un certain nombre de points avec ceux
qui l’ont proposé le poste de secrétaire général. Il faut noter aussi qu’au
moment où Nkrumah retourne au Ghana, bien des problèmes campaient les décors
notamment la maladie du cacaoyer le « swollen shoot » ce qui
appauvrit les planteurs. D’autre part on note la marche des anciens combattants.
Ils sont au nombre de 63.000 qui ont servi notamment au moyen Orient et en Birmanie,
ils estiment être marginalisés. La marche vire au drame : des boutiques
d’européens sont mises à sac, des prisonniers sont libérés. Bilan des émeutes
en 2 jours : 29 morts et 200 blessés. Nkrumah qui exige le départ du
gouverneur est arrêté. Libéré plus tard, il créé le journal précédemment cité
le « Accra Evening News ». Nkruma quitte l’U.G.C.C. (United Gold Coast Convention)
et créé son parti le C.P.P. (Cconvention People’s Party). Il utilise notamment
les doctrines de Gandhi pour développer son plan d’action et milite pour le panafricanisme En Janvier 1950, Nkrumah qui préparait une
manifestation est arrêté. De sa cellule, il est toujours actif. Il faut aussi
noter qu’à la même année, une nouvelle constitution inspirée du rapport de la commission Coussey,
transforma le Conseil législatif en Assemblée nationale et le conseil exécutif
en gouvernement. En 1951, le C.P.P. remporta les élections législatives. Nkrumah
devient chef du gouvernement puis premier ministre.
(Déclaration
indépendance du Ghana . Source : getty images )
Nkrumah et le panafricanisme à l'ère du Ghana...
Arrivé au pouvoir, le Ghanéen n’abandonne pas pour autant ses
idéaux panafricanistes et s'intéresse aux autres pays du continent plongés dans
la lutte coloniale. « Le nationalisme africain ne se limite pas seulement au
Ghana », affirme-t-il, rappelant lors des nombreuses réunions panafricanistes
qu’il accueille dans son pays que la décolonisation nationale n’était pas la dernière
étape du combat anticolonial, mais le point de départ de la lutte pour une
Afrique réunie.
Sous
son égide, dans les années 1960, le Ghana est devenu le refuge très recherché
des panafricanistes du monde entier, notamment celui des Africains-Américains
dont les ouvrages avaient permis de structurer la pensée politique du futur
président. Outre le célèbre Docteur W.B. Du Bois à qui il rend hommage en lui
accordant la nationalité ghanéenne, Nkrumah accueille des militants et
intellectuels reconnus pour leur contribution à la réflexion sur l’identité
noire : la poétesse Maya Angelou, le militant Malcolm X, la communiste Vicki
Holmes Garvin, l’essayiste Julius Mayfield pour ne citer que ceux-là.
Parallèlement, joignant l’idéologie à l’action, le
leader ghanéen propose dès 1958 une union fédérale à la Guinée, mise au ban de
la communauté française pour avoir osé dire « non » à de Gaulle. En guise
de soutien à son ami le président Sékou Touré, il lui consent un prêt de 25
millions de dollars lorsque la France coupe les ponts brutalement avec Conakry,
suite à la déclaration d’indépendance de son ancienne colonie. En 1960, Nkrumah
va encore plus loin, en inscrivant dans la Constitution du Ghana la possibilité
d’un abandon de souveraineté au profit d’une fédération africaine, suivant
ainsi dans les pas de Sékou Touré qui avait été le premier Africain à avoir
envisagé une telle éventualité. En 1963, Nkrumah est l’un des pères fondateurs
de l’Organisation de l’Union africaine (OUA). Il faut aussi noter qu'en avril,
il initie la conférence des États indépendants d’Afrique qui réunit l’Égypte,
l’Éthiopie, le Ghana, le Liberia, la Libye, le Maroc, le Soudan et la Tunisie,
ce qui était un succès extraordinaire. En décembre, la conférence des peuples
d’Afrique fut une tribune sans précédent pour les délégués de partis, de
mouvements ou de syndicats de vingt-huit pays, la plupart encore à l’état
colonial. Y apparurent des inconnus qui allaient faire du chemin, comme Patrice
Lumumba, à qui Nkrumah enverra des troupes après l’indépendance du Congo.
-
Groupe de Casablanca...
Constatant
qu'ils sont minoritaires dans le groupe africain formé á l’ONU, les pays
africains « progressistes » réagissent. Le Maroc , déplorant le soutien du
groupe de Brazzaville á l'indépendance de la Mauritanie (en raison du
contentieux frontalier qui oppose les deux pays) , annonce une conférence á
Casablanca , qui réunit en janvier 1961 le Ghana , la Guinée , le Mali , la RAU
( Égypte et Syrie) , ainsi que la Lybie , le GPRA et Ceylan en tant qu'observateurs
. Unis sur l'Algérie et dans leur condamnation du colonialisme et de l’apartheid,
les pays du « groupe de Casablanca » sont en revanche divisés sur d'autres dossiers.
Le Ghana, qui refuse de retirer ses troupes envoyées au Congo,accepte, pour ne
pas être totalement isolé, d'endosser la résolution de la RAU condamnant Israël
(avec lequel il entretient pourtant de solides relations). Signée en mai 1961
par les ministres des Affaires étrangères, á l'exception de celui de la Lybie,
la charte établit un comité politique réunissant les chefs d’État, un comité
économique réunissant les ministres des Finances, un comité culturel réunissant
les ministres de l'Éducation et un commandement suprême réunissant les
états-majors des pays membres. L'interdiction de conclure des pactes militaires
avec des puissances étrangères est soulignée. Mais, contrairement aux souhaits
de Nkrumah, la charte de Casablanca ne parle nullement d'abandonner les
souverainetés pour fusionner dans une union politique. Bamako est désigné comme
la capitale du groupe, qui reste ouvert aux autres pays.
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Conférence d'Addis-Abeba
L’Organisation de l’unité africaine (OUA), créée dans
un contexte de lutte contre le colonialisme, est née le 25 mai 1963 à
Addis-Abeba. Issue d'une aspiration des Africains à l'union afin de promouvoir
la solidarité du continent contre toutes les formes d’impérialisme, elle est
aussi l’aboutissement d’une bataille diplomatique entre chefs d'États. Deux
camps s'étaient dégagés : celui du « groupe de Monrovia », conçu comme le
regroupement des « modérés » qui souhaitaient que l’intégration régionale se
fasse par étape ; et le « groupe de Casablanca », qui rassemblait des leaders
révolutionnaires adeptes d’une intégration rapide, comptant notamment dans ses
rangs le Ghanéen Nkrumah, l'Égyptien Nasser, l'Algérien Ben Bella et le Guinéen
Sékou Touré. Cet antagonisme et les compromis qui ont résulté ont abouti à la
première phase de réalisation de l'idéal panafricain et en même temps ont
durablement consacré une Afrique des divisions. L’Organisation de l’unité
africaine (OUA), créée dans un contexte de lutte contre le colonialisme, est
née le 25 mai 1963 à Addis-Abeba. Issue d'une aspiration des Africains à
l'union afin de promouvoir la solidarité du continent contre toutes les formes
d’impérialisme, elle est aussi l’aboutissement d’une bataille diplomatique
entre chefs d'États. Deux camps s'étaient dégagés : celui du « groupe de
Monrovia », conçu comme le regroupement des « modérés » qui souhaitaient que l’intégration
régionale se fasse par étape ; et le « groupe de Casablanca », qui rassemblait
des leaders révolutionnaires adeptes d’une intégration rapide, comptant
notamment dans ses rangs le Ghanéen Nkrumah, l'Égyptien Nasser, l'Algérien Ben
Bella et le Guinéen Sékou Touré. Cet antagonisme et les compromis qui ont
résulté ont abouti à la première phase de réalisation de l'idéal panafricain et
en même temps ont durablement consacré une Afrique des divisions. En cette
occasion Nkrumah soutient 《Je suis heureux de me trouver à Addis-Abeba, en cette
occasion hautement historique. J’apporte
avec moi les espoirs et les félicitations fraternelles adressés par le
gouvernement et le peuple du Ghana à Sa majesté Impériale Hailé Sélassié et à
tous les Chefs d’Etat africains rassemblés dans cette ancienne capitale, en ce
jour qui fera époque dans notre histoire. Notre objectif, c’est, dès
maintenant, l’unité africaine. Il n’y a pas de temps à perdre. Nous devons
maintenant nous unir ou périr. Je suis certain que par des efforts concertés et
notre ferme propos, nous allons jeter ici même les fondations sur lesquelles
s’élèvera une union continentale des Etats africain》. Finalement
sa proposition n’est pas prise en compte et on adopte la mesure de l’intangibilité
des frontières.
Nkrumah et la cohabitation en Afrique de l'ouest...
Il faut noter que l'Afrique occidentale était plus dans le giron
français qu’anglais. Bon nombre des leaders francophones étaient hostiles à la
démarche de Nkrumah : Houphouët-Boigny,Hamani Diori etc. D'un autre côté, il
partage bien ses idées panafricaines avec SékouTouré. Le leader ghanéen propose
dès 1958 une union fédérale à la Guinée, mise au ban de la communauté française
pour avoir osé dire « non » à de Gaulle. En guise de soutien à son ami le
président Sékou Touré, il lui consent un prêt de 25 millions de dollars lorsque
la France coupe les ponts brutalement avec Conakry, suite à la déclaration
d’indépendance de son ancienne colonie. Il va même former une République
Ghana-Guinée en 1958 et seront rejoint plus tard par le Mali qui cherche sa
voie suite à la dislocation de la Fédération du Mali. Avec Houphouët-Boigny ,
c'est pas la grande entente : Le 7 avril 1957, un mois après l’indépendance du
Ghana, le futur président Houphouët-Boigny avait parié à son voisin, en visite
à Abidjan, que la Côte d’Ivoire, ayant opté pour le libéralisme économique et
pour une étroite association avec la France, atteindrait un niveau de
développement supérieur à celui du Ghana socialiste en moins de dix ans.
Lorsqu'en 1966 Nkrumah subit un coup d'État et que Sékou Touré propose
d'envoyer l'armée Guinée pour rétablir Nkrumah,Houphouët-Boigny s'offusque et
soutient que ce n’est pas la première fois que des militaires prennent le
pouvoir en Afrique. Alors que 2 ans plutôt au Gabon, l'armée française entre en
territoire gabonais pour rétablir Léon Mba. A t-il eu la même réaction ?
A partir de 1960, « l’année des indépendances », les relations du Ghana
avec ses voisins sont exécrables. En effet, Nkrumah soutient les mouvements
irrédentistes du Togo et de la Côte d’Ivoire. Dans le même esprit, il donne
asile et moyens à d’autres partis d’opposition armée, le Sawaba du Niger et
l’Union des populations du Cameroun. Il faut aussi noter qu'avec
Sylvanus Olympio, l'animosité planait dans l'air.Cette donne peut être expliqué
sur deux points : le premier, le fait que le peuple Ewé soit des deux côtés de
la frontière entre le Ghana et le Togo. Le deuxième point, par le fait que
Nkrumah considère que le Togo est une création coloniale et qu'il fait parti du
Ghana.
Le régime Nkrumah...
L’indépendance
du pays n’apporte pas de changement radical au système hérité de l’ancien
colonisateur. Si, certes, les infrastructures connaissent un développement,
comme la réalisation à Tema d’un grand port en eau profonde relié à la capitale par une
autoroute, aucun projet d’industrialisation n’est clairement défini.
De
plus, cette modernisation du pays entraîne une détérioration de la situation
économique : le déficit public et celui de la balance des paiements
s’accroissent et, bien qu’ayant adopté une économie d’inspiration libérale, les
investissements étrangers sont quasi-nuls. Et, si jusque-là l’inflation est
contenue, en revanche les salaires des planteurs de cacao ne font que régresser
depuis 1954, accentuant ainsi la crise. Cet échec économique, imputé à Nkrumah,
se transforme en crise politique
Déjà
en 1959, Nkrumah restreint la démocratie en emprisonnant certains membres de
l’opposition, ou bien en les forçant à l’exil, comme le chef de l’opposition
unie Kofi Busia. Mais ce n’est qu’à partir d’octobre 1961, après une tournée de
deux mois (juillet-août) dans les pays du bloc de l'Est, que Nkrumah oriente
réellement le Ghana vers une dictature. En effet, en septembre sont organisées
des grèves qui, tout en revendiquant des hausses de salaires, manifestent
également leur opposition au régime.
( Nkrumah avec le leader chinois
Mao Zedong . Source : getty images )
Nkrumah
les réprime impitoyablement, et décide d’arrêter les principaux leaders
syndicalistes. Puis, peu de temps après, il arrête tous les membres
parlementaires de l’opposition et censure la presse. Tandis que la répression
sur la droite s’accentue et que les relations avec les pays occidentaux se
dégradent, Nkrumah rejoint, officieusement, le camp socialiste (bien que se
déclarant non-aligné), en juillet
1962, en optant pour le marxisme lors de la XI conférence du CPP. Sous la
doctrine du « consciencisme » (ou « nkrumahisme »), une économie planifiée est
mise en place, qui va être marquée par un gaspillage des ressources naturelles,
un accroissement de la corruption, une montée du chômage et la faillite
économique du secteur agricole. Cette nouvelle politique économique entraîne
une augmentation du coût de la vie de 48 % entre 1963 et 1966, ainsi que la
désorganisation des marchés provoquant marché noir et ruptures de stocks.Devant
ce désastre économique, le climat intérieur se détériore ; Nkrumah échappe à
deux tentatives d’assassinat en août 1962 et en janvier 1964 qui vont le
plonger dans une véritable paranoïa. Ne croyant plus en personne, ne supportant
plus aucune critique, Nkrumah se met à durcir son régime, tandis qu’il promeut
un véritable culte à sa personnalité, se faisant appeler l’ « Osagyefo » (le «
Rédempteur »). En 1963, il restreint l’indépendance du pouvoir judiciaire et
érige, le 26 janvier 1964, le monopartisme avec le CPP, instituant ainsi une
dictature de parti unique. Puis la même année, se proclame président à vie.
( Des enfants sur le statu de Kwame Nkrumah après sa chute .
Source : getty images )
Nkrumah, la chute...
Isolé à l’intérieur de son pays, il l’est également, de plus en
plus, à l’extérieur. Son orientation socialiste lui vaut de se mettre à dos les
pays occidentaux mais également certains dirigeants africains qui le soupçonnent,
dans ses projets de panafricanisme, de vouloir propager le communisme en
Afrique.Le 24 février 1966, alors qu'il est en voyage en Chine, Nkrumah est
renversé, sans aucune résistance, par un coup d’État militaire.
Il se réfugie alors en Guinée, chez son ami Sékou Touré qui lui propose vainement la coprésidence du pays. Il fonde alors, dans son pays d’exil, une maison d’édition qui publie ses théories révolutionnaires et ses livres sur l’Unité africaine. Le 27 avril 1972, il décède dans un hôpital de Bucarest, de la suite d’un cancer de l’estomac.
« Il est devenu simultanément un héros africain et un dictateur ghanéen ». C'est sur ces mots du kényan Ali Mazrui que nous refermons ce numéro de Grands d’Afrique.
(
Nkrumah , premier ministre du Ghana ,
source getty images )
Bibliographie :
Bokhari-YabaraAmzat, AfricaUnite
! Une histoire du panafricanisme, Editions La Découverte,
Paris, 2014, 320 pages
Contribution
à la Conférence des intellectuels d’Afrique et de la Diaspora (CIAD I), Le
mouvement panafricaniste au vingtième siècle, Dakar, 7-9 Octobre 2004 , 642
pages
Webographie :
Gaillard
Philippe, Nkrumah coprésident de la
guinée, Jeune Afrique, 04 Mars 2003
Chanda
Tirthankar, Grandeur et déclin de KwameNkrumah, père du panafricanisme, RFI,
24-02-2016
Filmographie
Ferrari
Alain,AFRIQUE(S), Une autre histoire du 20ème siècle, Temps noir avec la
participation de France 5, 2010
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